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sur l'auteur

Je m'appelle Frédéric Faravel. Je suis né le 11 février 1974 à Sarcelles dans le Val-d'Oise. Je vis à Bezons dans le Val-d'Oise. Militant socialiste au sein de la Gauche Républicaine & Socialiste. Vous pouvez aussi consulter ma chaîne YouTube. J'anime aussi le groupe d'opposition municipale de gauche "Vivons Bezons" et je suis membre du groupe d'opposition de gauche ACES à la communauté d'agglomération Saint-Germain/Boucle-de-Seine.
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Gauche Républicaine & Socialiste

11 décembre 2023 1 11 /12 /décembre /2023 14:10

J'ai rédigé pour la Gauche Républicaine et Socialiste la note ci-dessous sur la dernière proposition de casse du droit du travail de Bruno Le Maire.

Bonne lecture...

Frédéric Faravel
Conseiller municipal et communautaire Gauche Républicaine et Socialiste (GRS) de Bezons
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains
Animateur national du pôle Idées, formation, riposte de la GRS

Licenciements abusifs : Bruno Le Maire, ministre voyou des patrons voyous

Bruno Le Maire a indiqué dans Le Parisien dimanche 3 décembre que le gouvernement veut s’attaquer à nouveau aux droits des salariés au pas de charge, en vue du vote de la loi Pacte II prévue début 2024. « Un recours contre l’entreprise reste possible pendant 12 mois. Il est important que les salariés puissent être protégés, mais ce délai est trop long ». L’objectif du ministre de l’économie est de réduire ce délai de recours à 2 mois…

Depuis la fin des années 2000, la prescription en matière de contestation de la cause réelle et sérieuse du licenciement a déjà été drastiquement réduite. En 2008, une loi l’avait divisée par six, de 30 ans à 5 ans. Puis en 2013, une autre loi avait entériné son passage à 2 ans. Aussitôt après l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, l’ouvrage a été remis sur le métier. Une baisse à six mois avait été initialement envisagée mais devant la levée de boucliers des syndicats, c’est le passage à un an qui avait été finalement retenu dans la réforme du Code du travail.

La proposition de Bruno Le Maire ne suscite aucun enthousiasme du côté des employeurs. Pourtant enclines à dénoncer les risques de contentieux, aucune des trois organisations patronales (Medef, CPME, U2P) n’est demandeuse d’une telle réduction des délais. Il faut dire que la succession des réformes du code du travail depuis Nicolas Sarkozy (quinquennat Hollande inclus évidemment avec les lois Macron et El Khomri) ont sérieusement déséquilibré le rapport de force en faveur du patronat. Après la création des ruptures conventionnelles en 2008, les ordonnances Macron de 2017 ont sérieusement desserré la pression judiciaire sur les employeurs, avec le plafonnement du montant des dommages et intérêts : le nombre de nouvelles affaires aux prud’hommes a baissé de 44% entre 2015 et 2022, car les salariés n’ont en réalité plus grand chose à attendre de ces instances. Procéder à un licenciement abusif – c’est-à-dire illégal ! – ne coûte plus grand chose…

L’ensemble des organisations syndicales de salariés ont dénoncé cette nouvelle sortie du gouvernement par la voix de son ministre de l’économie et nous partageons leur colère. En effet, ne pas laisser aux salariés le temps de constituer un dossier recours – deux mois, c’est trop court pour sortir de la sidération, se renseigner sur ses droits et pouvoir contester à temps – ne peut que favoriser les patrons voyous ; les cas de licenciement abusif risquent donc de se multiplier … encore.

En réalité, la remontée des chiffres du chômage inquiète le gouvernement qui voit s’éloigner l’objectif des 5% en 2027. Emmanuel Macron et ses gouvernements ont toujours été acquis à une vision idéologique du marché du travail et de l’activité économique… Récemment encore le Chef de l’État déclarait au patronat « Réveillez-vous ! » son raisonnement est à la fois transparent et parfaitement irrationnel… Emmanuel Macron et le centre libéral-autoritaire qui le soutient sont convaincus d’avoir « fait le job », « j’ai précarisé les travailleurs, j’ai flexibilisé le marché du travail, j’ai pénalisé les chômeurs, c’est à vous de nous faire passer de 7,4 à 5%. » Or la facilitation des licenciements, l’indulgence accrue pour les écarts aux codes du travail, la flexilibisation du marché du travail, tout cela ce sont des stratégies qui ont été entamées dans les années 1990 et qui ne fonctionnent pas. Elles ont en réalité donné peu de résultats et une nouvelle étape n’en donnera pas plus. La maltraitance à l’égard des salariés, la casse du droit du travail et la précarisation des travailleurs vont assurément encore dégrader le climat social, mais cela ne créera pas d’emplois, pas plus que cela n’en a créé auparavant d’ailleurs. Et cela ne peut tenir lieu d’une véritable politique industrielle qui manque toujours à la France.

Construire le plein-emploi de demain ne se fera pas en renforçant l’exploitation : non ! Nous voulons une société de citoyennes et de citoyens émancipés, fiers de ce qu’ils apportent à la société, fiers du fruit de leur travail.

Cela passe par des salaires justes, par des protections sociales et juridiques fortes, par la participation des travailleurs aux décisions économiques et par un État qui s’engage aux côtés des entreprises dans la reconquête de nos capacités productives.

Licenciements abusifs : Bruno Le Maire, ministre voyou des patrons voyous
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1 novembre 2023 3 01 /11 /novembre /2023 10:09

Il aura fallu attendre 4 mois, presque jour pour jour, après la mort de Nahel et les émeutes urbaines qui l’ont suivie, pour que la Première Ministre présente en deux temps les réponses du gouvernement à l’explosion de violences de la fin du mois de juin, qui avait remis au centre du débat public la question de la Ville. On avait suffisamment reproché à l’exécutif de tirer des conclusions hâtives, démagogiques et passe-partout quelques jours après les événements, pour être en droit d’espérer, qu’après ces longues semaines de réflexion, que celui-ci ait enfin affiné son diagnostic et mûri les réponses à apporter.

Il n’en est rien, malheureusement… L’Élysée et Matignon n’ont visiblement pas évolué depuis le mois de juillet, restant scotchés à la surface des enjeux pour les noyer dans un discours de fermeté armée et des propos hors sol sur l’autorité familiale.

Rien d’étonnant donc que, dans la mise en scène des annonces gouvernementale, Élisabeth Borne ait donné la priorité à la réponse sécuritaire avant de réunir à Chanteloup-les-Vignes un Comité interministériel des Villes plusieurs fois reporté.

Elisabeth Borne prenait la pose à Chanteloup-les-Vignes vendredi 27 octobre 2023

Elisabeth Borne prenait la pose à Chanteloup-les-Vignes vendredi 27 octobre 2023

Miroir aux alouettes sécuritaire

Jeudi 26 octobre 2023, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, à Paris, devant un parterre de quelque 250 maires, dont pour la plupart les villes avaient été touchées par les violences urbaines de l’été, Élisabeth Borne a donc présenté une série de mesures destinées à « réaffirmer l’autorité et l’ordre républicain ». Nous ne contesterons pas ici l’idée qu’il n’y a aucune réponse à apporter dans ce domaine : cette question existe et il faut la traiter ; pourtant, nous ne pouvons que nous inquiéter sur l’absence de diagnostic sur ce qui a conduit à cette remise en cause de l’autorité républicaine.

Les mesures annoncées sont clairement inscrites dans une matrice idéologique répressive, peu nourries par les sciences sociales ; il y a un décalage entre les politiques publiques qui s’appuient de plus en plus sur des opinions et de moins en moins sur des travaux de recherche, ce qui est une faiblesse majeure. L’exécutif semble in fine adopter une posture fataliste : les émeutes reviendront et donc la seule préoccupation est de savoir comment nous y ferons face, plutôt que d’en prévenir l’irruption. Devant des élus traumatisés par les destructions de bâtiments et services publics, la logique est la même : personne ne pourra critiquer la promesse de la cheffe du gouvernement de compléter les remboursements des assureurs par un fonds de 100 millions d’euros, mais plutôt que de se contenter de se réjouir que « 60 % des bâtiments publics partiellement ou totalement détruits ont d’ores-et-déjà été remis en état », le rôle d’un gouvernement serait de prévenir de tels événements.

Plus grave, il y a une forme de militarisation du discours gouvernemental : les expressions « opération coups de poing », « envoyer des forces », « task force » l’illustrent à l’envie. Ainsi, le dispositif FAR (Forces d’Action Républicaine), annoncé par la Première Ministre, consisterait à envoyer temporairement sur un territoire en difficulté des policiers, des fonctionnaires des finances, mais aussi des personnels éducatifs. Tout cela témoigne en réalité d’un manque d’action publique pérenne et ancrée sur le terrain. Il existe bien entendu des cas où une telle intervention peut être utile à certains moments, mais la résolution des inégalités urbaines nécessite la mise en œuvre de politiques publiques, dotées de réels moyens, au long terme. Cela fait près de 20 ans que les acteurs de la politique de la Ville se plaignent de voir progressivement les crédits « exceptionnels » remplacer ceux de « droit commun », nous y reviendrons.

La France n’a pas besoin de « coups de poing » mais d’action publique durable

Mais même du point de vue de la stratégie d’ordre public, on sent un flottement de l’État qui ne peut en aucun cas rassurer les différents acteurs du dossier.

Nicolas Sarkozy avait aboli dès 2002 la police de proximité par dogmatisme, or il faudra bien changer de paradigme et ne pas cantonner l’action de la police à des arrivées en force, pour s’imposer dans des quartiers qu’elle ne connaît plus. Ce constat est aujourd’hui assez largement partagé par les élus locaux, parfois même si cela en place certains en contradiction avec leur affiliation partisane. Pourtant, le vocable de « police de proximité » reste tabou et l’expérimentation des unités de « police de sécurité du quotidien » a eu un impact extrêmement limité1 du fait de la faiblesse des moyens et des crédits qui lui ont été consacrés et donc de la réalité de ses implantations. Aussi la cohérence et la pérennité de l’action publique de terrain, y compris sur le thème de la sécurité, devront revenir à l’ordre du jour, même si ce n’est pas le chemin pris par l’exécutif macronien : il faudra remettre ouvertement sur le métier la police de proximité et en tirer les conséquences en matière de politique de tranquillité publique, c’est-à-dire privilégier le quotidien sur le « maintien de l’ordre ».

La question de l’élargissement des pouvoirs des polices municipales est plus controversée. Et, là aussi, elle divise les élus locaux, même au sein de la droite. Certains prétendent évidemment faire des maires de véritables shériffs, comme Arnaud Robinet (Maire Horizons de Reims), Christian Estrosi (Maire Horizons de Nice) ou encore Eric Ciotti, le patron de LR. Mais, là encore, la réalité du terrain rattrape les effets d'annonce : le renforcement des pouvoirs des polices municipales s'accompagnerait immanquablement d'un transfert croissant de l'action de sécurité vers ces services et donc d’un recul de celle conduite par la police nationale et la gendarmerie. Un Maire LR comme Benoît Digeon à Montargis rappelait en marge du happening de La Sorbonne que le commissariat de son secteur a perdu 30 policiers en 4 ans. D'une manière générale, il a été constaté partout que les effectifs de police nationale baissaient là où une police municipale était en place, que la baisse de ces effectifs s'accélérait quand une commune prenait la décision de créer une police municipale pour faire face au dépeuplement des commissariats et que, finalement, cette baisse était d'autant plus forte que le discours sécuritaire de l'édile local était appuyé.

1La police de sécurité du quotidien sous l’angle des partenariats locaux, note de Virginie Malochet pour l’Institut Paris Région – 30 juin 2021

Jusque dans le maintien de l’ordre, le rappel à l’autorité de l’État par Élisabeth Borne masque un désengagement pour renvoyer la responsabilité aux collectivités

Cette « tarte à la crème » des pouvoirs des polices municipales pourrait pourtant séduire momentanément certains élus locaux, car ils sont confrontés à l'effet ciseau des dépenses conséquentes que représentent la création et l'entretien d'un tel service et la déception des électeurs quant aux résultats concrets de son action au regard de ses moindres compétences. Mais mettre en pratique concrètement la logique présentée par Élisabeth Borne signerait également une catastrophe au regard de l'égalité territoriale : enkystées dans une logique de maintien de l'ordre, la police nationale et la gendarmerie déserteraient progressivement les Villes dans lesquelles la sécurité serait dépendante des capacités d'investissements des collectivités territoriales. On pourra compter des effectifs pléthoriques et bien équipés, des caméras par centaines (avec les écrans de contrôle et les « opérateurs » que cela suppose), à Nice ou à Rueil-Malmaison, mais que se passera-t-il à Charleville-Mézières ou à Grigny ?

On voit bien ici la mauvaise réponse apportée par le gouvernement à un problème concret constaté lors des émeutes : le temps d'intervention des effectifs de police nationale parfois éloignés des lieux des violences. On préfère donc l'inégalité territoriale à la police de proximité. Il n’est sans doute pas besoin ici d’insister sur le problème politique que créerait une municipalisation quasiment complète de l’action policière dans certaines communes…

Cela n’empêche pas de réfléchir aux moyens juridiques, aux stratégies d’action… mais là encore on bute soit sur des illusions ou soit sur l’absence d’engagement budgétaire concret.

Par exemple, l’obligation pour un jeune délinquant de respecter de jour comme de nuit un placement dans une unité éducative de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) et d'y suivre les activités de formation et d’insertion de l’unité peut apparaître comme une réponse adaptée et proportionnée qui peut déboucher sur une véritable logique de réinsertion, mais faudrait-il encore que les services de la PJJ soient en capacité de l’assumer alors qu’ils subissent depuis plus de 20 ans un déficit constant de moyens humains et financiers.

La Première ministre a encore martelé : « Dans certains cas, nous pouvons envisager un encadrement de jeunes délinquants par des militaires ». Son entourage évoquait après cette annonce la montée en puissance du « partenariat Justice-armées » avec « les classes de défense dans les CEF, la mise en place de mesures d’encadrements militaires dans toutes les régions, la signature de nouvelles conventions locales pour la réalisation de travaux d’intérêt général (TIG) au sein d’unités militaires et la participation des militaires dans l’organisation de stages de citoyenneté ». L’armée française est certes disciplinée et aux ordres du pouvoir politique, mais si le « partenariat Justice-armées » a besoin, aux yeux du gouvernement, de monter en puissance, c’est que les militaires à tous les niveaux de la hiérarchie rechignent légitimement à s’engager dans une logique qui n’appartient en rien à leurs missions et pour laquelle ils n’ont pas été formés. Il est d’ailleurs parfaitement consternant que la seule référence à une démarche éducative fut celle de l’horizon de la discipline militaire, alors que la Première Ministre, d’inspiration sociale-libérale paraît-il, s’adressait aux élus dans l’auditorium de La Sorbonne, haut lieu de l’enseignement s’il en est…

La force d’une sanction, notamment chez les plus jeunes, ce n’est pas sa brutalité, c’est sa précocité et sa certitude…

détournement d'une intervention de Benjamin Morel

« Tarte à la crème » également que les discours sur les réseaux sociaux. Ils ont sûrement joué un rôle important dans les émeutes, en matière de coordination et d’entraînement. Le gouvernement prétend vouloir suspendre les comptes des délinquants et émeutiers. Nous lui souhaitons bon courage dans ses négociations avec Twitter, Snapchat et Meta ; au regard de l’absence de régulation de ces espaces et de la facilité avec laquelle on peut créer de multiples comptes, cette mesure semble illusoire, alors même que le gouvernement refuse d’engager une réflexion sérieuse sur l’évolution de la législation comme l’a démontré l’examen du projet de loi « sécurité et régulation de l’espace numérique ».

La multiplication par cinq de l'amende pour non-respect d'un couvre-feu par un mineur, en la portant à 750 euros (au lieu de 150 euros) et tout le discours autour de la responsabilisation des parents – aggravation de la peine du délit de soustraction d’un parent à ses obligations légales, "contribution citoyenne familiale éducative" versée à une association d’aide aux victimes, responsabilité financière civile solidaire des deux parents d'un enfant coupable de dégradations, stages de responsabilité parentale, etc. – relèvent également de la posture. Rappelons deux chiffres : 60% des jeunes émeutier sont issus de familles monoparentales, 40% des enfants résidant au sein d’une famille monoparentale vivent sous le seuil de pauvreté… La définition des aides à apporter aux familles monoparentales est renvoyée aux bons soins d’une commission à créer… alors que la part de ces familles est de 35% en Seine Saint-Denis contre 20% dans le reste du pays. Les moyens dévolus au soutien scolaire et à l’éducation populaire sont très insuffisants. Au regard de cette situation sociale, de telles annonces ne peuvent être que des pétitions de principes.

Pétition de principes, parce que la force d’une sanction, notamment chez les plus jeunes, ce n’est pas sa brutalité, c’est sa précocité et sa certitude. Cela implique d’avoir une justice efficace ; or le problème de la justice en France n'est pas seulement d'être engorgée et de souvent tarder à prononcer des peines, c'est aussi et surtout d'avoir, faute de moyens, la capacité à les faire exécuter, avec des conséquences dévastatrices en matière d'autorité, de sens des responsabilités et de l'impunité. On peut annoncer la plus grande et disproportionnée des sévérités, elle n'en sera que plus contre-productive si on ne peut concrètement l'exercer. Et cela s'applique là encore aux amendes aggravées ou à la responsabilité financière des familles que prétend instaurer le gouvernement – de la même manière que pour la mesure réclamée par la droite de suspension des allocations familiales : personne ne pourra en réalité recouvrer les sommes concernées sur des familles le plus souvent insolvables que cela plongerait également dans des difficultés sociales accrues.

Sans vouloir retomber dans le travers de l'excuse sociale, on voit mal comment on peut exiger d’une mère seule que ses adolescents ne sortent pas dans la rue quand l'appartement est trop petit ou que le réfrigérateur est vide.

Le gouvernement préfère les discours martiaux mais ne pas s'attaquer à la pauvreté. C'est assez logique puisque celle-ci a progressé depuis l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron. Et cette logique ne se dément pas lorsqu'on examine le prétendu "volet social" de la réponse gouvernementale.

Réponse sociale, vous êtes sûrs ?

On connaît la chanson et elle a été entonnée avec entrain aux lendemains des émeutes sur un air qu’on pourrait croire composé par l’association ultralibérale, antifiscale et proche de l’extrême droite Contribuables Associés1 : la politique de la Ville est un échec, « un puits sans fond » qui favorise tout à la fois l’assistanat, le détournement des crédits pour des associations inutiles et nourrit les islamistes… Les violences qui ont suivi la mort de Nahel étaient censées démontrées une nouvelle fois le gaspillage de l’argent public, les émeutiers qui auraient profité « grassement » de ces budgets finissant par détruire les équipements publics mis à leur disposition : « de la confiture pour des cochons », pourrait-on dire… c’était peu ou prou le discours de l’extrême droite, d’une partie de la droite (on ne s’étonnera pas), mais aussi derrière Gérald Darmanin d’une partie de la « non majorité présidentielle ».

Quand on veut tuer la politique de la Ville, on l’accuse « d’avoir la rage »…

Ainsi, chaque année, entre deux et trois milliards d'euros sont débloqués directement ou indirectement pour la politique de la ville. On compte un peu moins de 600 millions d’euros pour les contrats de Ville. S'y ajoutent aussi des mesures fiscales : certaines PME et petits commerces de banlieue sont exonérés de cotisations foncières ; en 2022, cette exonération a coûté 235 millions d'euros à l'État. Il y a également une enveloppe de solidarité urbaine, pour les communes les plus pauvres, à hauteur de 2,5 milliards d'euros dépensés l'année dernière. Mais ce qui concentre le plus d'effort, c'est le programme national de rénovation urbaine et le programme de renouvellement urbain : entre 2003 et 2022, près de 46,5 milliards d'euros ont été dépensés pour rénover quartiers et bâtiments. Sauf que, depuis 2003, l'État n'a investi "que" 3 milliards d'euros. En revanche, 20 milliards d'euros proviennent d'une partie des loyers, versés aux organismes HLM. L'effort vient également de l'Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU), près de 12 milliards d'euros déboursés. Les collectivités territoriales aussi, ont mis la main à la pâte, en versant depuis 2003, plus de 9 milliards d'euros.

Or les collectivités territoriales et les organismes HLM ont été parmi les institutions particulièrement maltraitées du premier quinquennat Macron. Les premières, qui assument directement le premier contact avec les citoyens, ont vu leurs recettes stagner et leur fiscalité propre disparaître peu à peu ; quant aux seconds, les gouvernements d’Emmanuel Macron leur ont carrément ponctionné plusieurs milliards d’euros alors même que leur rôle est de construire puis de gérer des logements abordables pour les foyers modestes et que chacun s’accorde à reconnaître une crise de l’accès au logement.

Élisabeth Borne peut bien avoir prétendu le 26 octobre à la Sorbonne qu'elle tenait à apporter des réponses qui « dépasse[nt] largement la question des quartiers et des banlieues », arguant qu'un tiers des villes concernées par les émeutes ne possèdent pas de quartier prioritaire. Mais là encore, il est nécessaire de rappeler que le nombre de « quartiers prioritaires » a été artificiellement mais drastiquement réduit lors du quinquennat de François Hollande : En juin 2014, Najat Vallaud-Belkacem faisait ainsi passer le nombre de 2500 à 1500 quartiers prioritaires répartis sur 700 communes – dont 100 nouvelles. L'affichage de quelques Villes (situées dans ce que certains géographes appellent la "diagonale du vide") a été en réalité payé par l'exclusion de 1000 quartiers en difficulté des dispositifs de soutien. En mars 2018, c’est le dispositif des "emplois francs" (dispositif peu convaincant au demeurant) qui a été circonscrit à 200 quartiers, et non 1500. En mai 2023, l’ex-ministre du logement et de la Ville, Olivier Klein, avait annoncé le lancement de la mise à jour de cette cartographie prioritaire : on l’a crue un temps enterrée par les émeutes et avec le ministre.

Mais en réalité, situer le débat sur la cartographie des quartiers prioritaires revient à se battre pour les miettes du gâteau.

Définir où sont les véritables responsabilités politiques de l’échec

Si la politique de la ville a permis un rattrapage à la marge dans certains quartiers, elle n’a jamais pu jouer un rôle de discrimination positive. La responsabilité de cet échec n’incombe pas à ces dispositifs et ces faibles crédits "exceptionnels", mais bien davantage à l’absence de redistribution massive des ressources ainsi que de politique publique véritablement égalitaire à la base. Ils n'ont jamais permis aux territoires les plus défavorisés de France d'avoir un traitement équivalent à la moyenne : la faute en revient aux inégalités flagrantes qui existent en matière de répartition de l'effort public et privé. Ce n’est pas la faute de la politique de la ville si aucun gouvernement n’a cherché à modifier les structures d’inégalités pénalisant la majorité des habitants des quartiers. De véritables déserts médicaux continuent à se développer en Seine-Saint-Denis, et un enfant scolarisé dans ce département plutôt qu’à Paris a reçu un an d’enseignement de moins lorsqu’il passe le baccalauréat.

Aucun président de la République, aucun premier ministre, aucun gouvernement depuis plus de 30 ans n'a réellement donné mandat à un ministre de l’Éducation nationale de poser sérieusement la question de la réussite éducative des classes populaires, et de s’attaquer enfin à la logique de reproduction sociale frappant l’école de la République. On connaît l'état de l’Éducation nationale, mais on pourrait tenir le même propos pour l'Hôpital public : sa situation est catastrophique en générale, elle est encore pire en Seine-Saint-Denis (par exemple). Mais le raisonnement vaut aussi pour la police nationale : il n’y a rien de surprenant à ce qu’elle se montre plus humiliante dans les quartiers populaires, lorsque l’on regarde les préjugés, ainsi que l’origine sociale et géographique des gardiens de la paix y évoluant la peur au ventre.

Depuis le rapport des ­députés François Cornut-Gentille (LR) et Rodrigue Kokouendo (LREM), publié en 2018 sur les moyens et l’action de l’État en Seine Saint-Denis, on peut affirmer sans être taxé de démagogie que la République accorde aux quartiers populaires dits « prioritaires » « quatre fois moins de moyens qu’ailleurs, rapporté au nombre d’habitants ». À cette inégalité flagrante et fondamentale, les annonces gouvernementales apportent une réponse ridiculement faible.

Au regard des défis pour la cohésion sociale et nationale de la persistance de territoires de relégation voire de ségrégation territoriale, les réponses données par la Première ministre lors du comité interministériel des Villes à Chanteloup-les-Vignes le vendredi 27 octobre semblent tout à la fois faibles et déconnectées des réalités. On voit mal comment le gouvernement pourra sur la base de sa « vision "Quartiers 2030" » de la politique de la ville favoriser « l’émancipation » plutôt que la « réparation ».

La principale mesure, et la plus commentée, annoncée lors de ce comité est la demande faite aux préfets « de ne plus installer, via les attributions de logement ou la création de places d'hébergement, les personnes les plus précaires dans les quartiers qui concentrent déjà le plus de difficultés » ... en clair, cela concerne les ménages "Dalo" (droit au logement opposable) les plus en difficulté qui ne pourront plus être logés dans des QPV. L’idée semble louable : elle paraît mettre en application le principe de ne pas rajouter toutes les difficultés au même endroit pour faciliter l’intégration de tous. Mais elle appelle plusieurs contradictions qui ravalent cette annonce au niveau d’une nouvelle gesticulation.

En effet, on a déjà dit que le nombre de QPV avait été drastiquement réduit ; certains quartiers classés jusqu’en 2014-2015 en politique de la ville n’ont pas vu nécessairement leur situation sociale s’améliorer, il y a fort à parier qu’ils recevront en priorité les publics les plus difficiles venant déséquilibrer une situation déjà précaire. Certains quartiers toujours classés en QPV se voient aujourd’hui accueillir les reclassements des quartiers proches soumis à un programme de renouvellement urbain : les personnes concernées ne relèvent pas du DALO, elles n’en ont pas moins de difficultés. L’annonce de la Première Ministre ne changera donc rien à ce type de situations. Le relogement des « personnes les plus précaires » ne devrait pas se faire non plus dans les zones périurbaines ou rurales : ces publics ont besoin d'une grande présence de services publics pour les accompagner, alors qu’ils ne sont pas véhiculés et ne pourraient alors accéder à des structures désormais éloignées.

Une mesure qui interdirait en pratique le relogement des foyers les plus précaires...

Fin 2022, le nombre de demandeurs de logements a atteint un record avec près de 2,5 millions de personnes, en hausse de 7 % par rapport à 2021. Or la construction de HLM, passée depuis 2020 sous la barre des 100 000 logements par an, devrait continuer de ralentir pour se stabiliser à une moyenne de 66 000 nouveaux logements annuels à partir de 2030. Concrètement, les bailleurs sociaux sont pris entre leurs obligations de rénovation et une dette croissante, dette qui a été aggravées par les milliards d'euros que leur a retirés l’État. Ces derniers n'auront donc pas les moyens de rénover et en même temps de construire de nouveaux HLM. Par ailleurs, poussés par l'interdiction progressive de louer les logements les plus énergivores, les bailleurs sociaux devront donner la priorité à la rénovation. Les réhabilitations de logements atteindraient un pic à 125 000 logements par an en 2025 et 2026, puis reflueraient, pour atteindre 90 000 par an sur la période 2031-2061, selon une étude la Banque des territoires (Caisse des Dépôts et Consignations). Une grande partie de ses demandeurs devraient se voir proposer un logement très social (PLUS ou PLAI). Dans le nouveau Schéma directeur de la région Île-de-France environnemental (SDRIF-E), adopté à la demande de Valérie Pécresse par le conseil régional le 12 juillet dernier, qui sert de référence dans les décisions d'aménagement de la région capitale, il est inscrit que les villes dont 30% ou plus du parc est composé de logements très sociaux ne doivent plus en construire… L’offre et la demande de logements très sociaux va donc subir un brutal effet de ciseau dans la région capitale ce qui aggravera une situation déjà extrêmement tendue.

Car en les cumulant à l’ensemble des initiatives engagées et aux conséquences de la catastrophique politique du logement d’Emmanuel Macron depuis 2017, les annonces du 27 octobre 2023 conduiront tout bonnement à rendre impossible le relogement des foyers les plus précaires. Pourquoi ? Parce que l’offre de PLUS et de PLAI n’existe pas (ou très peu) dans les quartier plus favorisés et pas seulement parce que l’électorat local et ses élus conservateurs s’y opposent – on connaît les combats d’arrière-garde des élus du XVIème arrondissement contre l’installation des foyers d’hébergement ou des logements sociaux… Il existe, en effet, des raisons économiques structurelles qui rendent particulièrement difficile la correction de cette logique de ghettoïsation que la président du conseil régional d’Île-de-France, Valérie Pécresse, dénonce tout en l’entretenant.

Proposer de nouveaux HLM suppose de les financer de leur construction à leur gestion… et le premier écueil est massif avant même la construction, c’est celui des prix du terrain, des prix du foncier. Dans les quartiers « bourgeois » concernés, le foncier est cher, très cher, et il est d’autant plus cher qu’il est rare ; dans ces conditions, même en ayant passé outre les états d’âme des élus conservateurs, même en accumulant tous les dispositifs qui permettent de subventionner la construction et d’alléger les coûts, les prix de sortie rendent impossible une production massive de logements sociaux et encore moins très sociaux dans ces quartiers. Les organismes HLM, confrontés à l’enjeu de la rénovation du parc et aux ponctions financières de l’État, n’ont pas les moyens de présenter des opérations trop déséquilibrées. En conclusion, mettre en œuvre la « fausse bonne idée » d’Élisabeth Borne supposerait une véritable révolution dans la stratégie de l’État en matière de logement, avec des investissements massifs et durables plutôt que de faire les poches du monde HLM, et une action contraignante et radicale sur la formation des prix du foncier… autant dire que l’on ne voit pas venir une telle évolution.

Il y a donc fort à parier que sa mise en œuvre reste à l’état d’effet d’annonces, avec quelques opérations qui seront mise en scène avant que les quartiers en QPV et ceux qui devraient y être continuent finalement d’accueillir les publics les plus défavorisés et restent ce qu’ils sont devenus aujourd’hui : des « hubs » du logement que les quelques foyers qui ont réussi à s’élever socialement fuient dès qu’ils en ont l’occasion pour être remplacés par des foyers extrêmement précaires qui rencontreront les plus grandes difficultés à s’intégrer économiquement et socialement, au milieu d’habitants qui partagent les mêmes peines qu’eux.

Car, en plus d’une action éducative puissante, de mise à niveau généralisée des services publics, le principal enjeu pour sortir les habitants des quartiers populaires est de leur donner durablement accès à l’activité économique. On a vu l’échec des « emplois francs » et des « zones franches », limités à des territoires toujours plus réduits : il vient en grande partie d’un aveuglement idéologique qui lie le chômage à un « coût du travail » supposé excessif… le même raisonnement nourrissait la course à l’ubérisation qui prétendait faire des plus ambitieux des auto-entrepreneurs à succès. On sait quelles frustrations et colères cette illusion a nourri (qui se lisent sans doute dans les votes de la présidentielle et des législatives) dans ces quartiers.

La plupart des territoires concernés ont en réalité subi une désindustrialisation massive et brutale, rendant inaccessible l’emploi pour des décennies. On attend encore le retour d’une politique industrielle digne de ce nom, qui ne donnera des résultats qu’à moyen terme.

Recyclage d’annonces présidentielles sous financées

Et ce ne sont pas les annonces présidentielles recyclées dans l’intervention de la Première ministre qui offriront beaucoup de perspectives. Déjà annoncé par Emmanuel Macron à Marseille en juin 2023, elle reprend le "plan entrepreneuriat Quartiers 2030", porté avec BpiFrance et la Banque des Territoires, doté de 456 millions d’euros sur quatre ans – 114 millions par an pour ancré l’activité économique dans les quartiers populaires. Est-ce bien sérieux ? Mais heureusement, le gouvernement veut également renforcer le programme "Les entreprises s’engagent pour les quartiers", avec l’objectif d’intégrer 2000 nouvelles entreprises pour atteindre un total de 6000 entreprises engagées. Nous voilà rassurés…

Enfin chacune des mesures suivantes, déjà annoncées précédemment, pose un problème de financement ou de logique de rustine. Sur le principe, il n’y aurait rien à redire. Les cités éducatives seraient généralisées d’ici 2027. L’accueil continu de 8h à 18h dans les collèges de REP et REP+, comme annoncé par le chef de l’État en juin à Marseille, serait assuré à partir de la rentrée scolaire 2024. Le gouvernement promet également une « convergence progressive du zonage des QPV et de celui de l’éducation prioritaire en assurant dès 2024 un traitement spécifique pour l’ensemble des écoles orphelines ».Un plan d’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques viserait à toucher 500 collectivités, pour « neuf heures d’ouverture supplémentaire par semaine en moyenne » et en particulier le dimanche. « Un abondement exceptionnel de la dotation globale de décentralisation » devrait financer cette mesure. Enfin, avec l’appui du fonds de co-investissement de l’ANRU, l’expérimentation de 60 centres de santé sera conduite d’ici 2027, avec pour « priorité d’aller vers les habitants et de les orienter vers les soins dont ils ont besoins ». Au regard des suppressions de postes encore annoncées dans l’éducation nationale, on s’étonne de la capacité à financer et assurer subitement les cités éducatives l’accueil continu dans les collèges et la convergence des zonages, alors que le ministère peine aujourd’hui à assurer les remplacements d’enseignants absents dans les mêmes territoires. L’abondement « exceptionnel » pour financier l’ouverture supplémentaire des bibliothèques laisse présager des lendemains qui déchantent, car une fois que ce sera éloigné l’actualité brûlante on connaît le destin des financements exceptionnels de l’État en direction des collectivités : il sera effectivement exceptionnel et les communes devront arbitrer entre le maintien de ces 9 heures supplémentaires et la suppression d’autres services dans le cadre d’un budget toujours plus contraints. Enfin, les expérimentations de centres de santé (60 pour toute la France ?!) ne remplaceront pas la nécessité de travailler à l’installation durable de médecins de ville et à la restauration d’un fonctionnement décent des hôpitaux publics.

Les annonces sur la nouvelle génération de contrats de ville pourraient prêter à rire si la situation n’était pas grave. Leur élaboration vient de gagner un délai de 6 mois supplémentaires (donc une liberté de trésorerie de 6 mois supplémentaires) pour des signatures fin mars 2024. Mais la nouvelle géographie prioritaire, officiellement mise en chantier lorsqu’Olivier Klein était encore ministre ne sera publiée qu’en décembre 2023 : à tout hasard, si de nouvelles communes devaient entrer dans le champ des QPV, elles auront 3 mois pour boucler leur dossier. Mais surtout, le discours sur la flexibilité et la liberté accordée dans l’élaboration des contrats de ville masque une réalité plus crue : les crédits d’État passeront généreusement de 597,5M€ en 2023 à 600M€ en 2024…

Ne rien changer pour que rien ne change

4 mois après des émeutes d’une intensité et d’une violence rarement connues, le gouvernement a donc choisi de privilégier la réponse sécuritaire et les opérations « coups de poing ». La reproduction de tels événements est en réalité perçue par l’exécutif comme inéluctable : à la supposée sécession d’une population à la dérive répond la sécession des élites qui finalement se détourne des habitants de son propre pays pour privilégier des solutions de « gestion de crise ». Et encore dans leur propre logique, on pourrait même finir par considérer que les moyens offerts à cette réponse sécuritaire sont sous-dimensionnés. Les Quartiers populaires sont plus que jamais regardés comme des espaces où il convient de temps à autre de restaurer l’ordre, mais pas d’assurer la tranquillité publique et encore moins de garantir la justice. Le volet social annoncé à Chanteloup-les-Vignes, pour compenser à la marge l’essentiel des mesures de nature répressive, est absolument anémique et inopérant.

Les Quartiers populaires ne sont en réalité que la partie la plus éruptive de la société française qui subit aujourd’hui de plein fouet les conséquences des politiques néolibérales qui lui sont imposées depuis 30 ans et ont non pas détruit mais profondément abîmé et rendu impuissant l’État social. Pour mettre en œuvre ne serait-ce que le début des mots utilisés par la Première ministre dans ses interventions des 26 et 27 octobre 2023 – « émancipation », « intégration », « respect de l’autorité », « cohésion sociale » – il faudrait une transformation radicale tant sur le fond que budgétaire pour l’éducation, la santé, le logement, la reconquête industrielle, le recul de la pauvreté, les collectivités et la présence de l’État sur le terrain.

Finalement, le fatalisme gouvernemental est logique… en ne changeant rien, il peut prévoir que tôt ou tard un nouvel épisode d’émeutes, peut-être plus violent encore, finira bien par intervenir. Sa seule préoccupation est d’être prêt à frapper le moment venu. Il n’est pas question de changer de politique et régler le problème à la racine.

Frédéric Faravel
Conseiller municipal et communautaire GRS de Bezons
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"
Animateur national du pôle Idées, formation, riposte de la Gauche Républicaine et Socialiste (GRS)

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4 septembre 2023 1 04 /09 /septembre /2023 13:59
Les difficultés vitales exprimées par les Les Restos du Cœur, mais aussi l’ensemble des organisations caritatives comme le Secours populaire ou Secours Catholique - Caritas France, marquent en réalité un triple échec des gouvernements français et de leurs politiques néolibérales croissantes.
 
1️⃣ l’échec de déléguer aux associations et aux collectivités la « gestion » de la pauvreté et de la faim… comme c'était pratique de demander à des réflexes de "charité chrétienne" améliorée (qu'importe la religion ici) pour camoufler la misère et faire édredon tout en se défaussant de ses responsabilités et en n'assumant plus vraiment le rôle de la République sociale !
 
2️⃣ l’échec de sa stratégie de réduire les crédits pour la solidarité… dans une république, on ne fait pas d’économies sur le malheur du monde !
 
3️⃣ l’échec annoncé, enfin, des politiques indignes de "retour à l’emploi" par la logique de punition (hein parce que pour Sarkozy, Hollande, Macron et Le Pen, finalement les chômeurs et les pauvres sont des fainéants) : la « baisse du chômage » devait faire reculer la pauvreté ? c’est surtout le nombre des Travailleurs pauvres et chômeurs pauvres qui augmente… l’inflation des prix alimentaires et de l’#énergie fait le reste.
Frédéric Faravel
Conseiller municipal et communautaire Gauche Républicaine et Socialiste de Bezons
Animateur national du pôle Idées, formation, riposte de Gauche Républicaine et Socialiste
La crise aux Restos du cœur le rappelle : la lutte contre la pauvreté n'est pas une affaire de charité
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19 avril 2023 3 19 /04 /avril /2023 10:11

Contribution du groupe municipal « Vivons Bezons » à l’enquête publique sur le Plan Climat Air Énergie du territoire de la communauté d'agglomération Saint-Germain-Boucles de Seine

Un rendez-vous manqué

L’adoption d’un plan Climat-Air-Energie pour notre communauté d’agglomération pourrait constituer en soi un élément positif car il est censé apporter à l’EPCI une approche stratégique et structurée, à condition ensuite de se doter d’instrument de planification écologique, répondant aux besoin de notre territoire.
Toutefois, ce projet apparaît daté mais également sous-dimensionné tant dans son périmètre que dans ses objectifs, les trajectoires prévues mais également en termes de méthode.
En réalité, aucun travail partenarial sérieux n’a été conduit en direction des associations, qui aurait pu mobiliser nos concitoyens pour la consultation et l’enquête publique ; cela supposait que l’exécutif de la communauté d’agglomération avait une réelle volonté de l’enrichir et de se doter de l’ambition qui lui fait défaut, y compris en termes de suivi pour les années à venir. Nous constatons en réalité que ce n’est pas le cas, ni au niveau communautaire, ni au niveau communal ; aucun effort sérieux pour muscler la participation citoyenne n’a été conduit : il s’agit ici pour les exécutifs communautaires et communaux d’un « mauvais moment à passer » dans l’attente que le document légal soit formellement adopté avant de passer à autre chose.
C’est donc un rendez-vous important mais un rendez-vous manqué, d’autant plus manqué que les ambitions affiché par l’agglomération dans son projet sont souvent en-deçà des obligations légales.

Vous trouverez ci-dessous au format PDF notre contribution à télécharger.

pour "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"
Frédéric FARAVEL
Conseiller municipal et communautaire (Gauche Républicaine et Socialiste) de Bezons

contribution du groupe Vivons Bezons au PCAET

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15 avril 2023 6 15 /04 /avril /2023 09:38

Le Conseil Constitutionnel a choisi de valider l’essentiel du projet de réforme des retraites porté par Emmanuel Macron et Élisabeth Borne.

Au-delà de la déception et de l'inquiétude, c'est bel et bien la colère qui m'anime depuis hier soir. Car au-delà du caractère profondément anti-social de ce texte, l’exécutif – avec l’aide de la majorité sénatoriale – avait accumulé les procédures constitutionnelles et réglementaires visant à tordre le bras des parlementaires en dévoyant l’esprit de notre démocratie républicaine : la validation de cette méthode anti-démocratique crée donc un précédent dangereux qui va concentrer plus que jamais auparavant tous les pouvoirs entre les mains de l’exécutif en abaissant plus encore le Parlement et donc la souveraineté populaire. Avec cette validation, l’exécutif peut se passer peu ou prou du Parlement et faire passer toute grande réforme sociale par le biais d’un PLFRSS qui impose des contraintes insupportables sur les parlementaires.

Le Parlement est plus que jamais abaissé et tous les pouvoirs sont de fait concentrés entre les mains du président de la République : c'est tout simplement inacceptable ! C’est la nature du régime qui peut s’en trouver modifiée et c’est sans doute l’ouverture d’une crise politique importante et durable dont notre pays se serait bien passé. En effet, les Français, rassemblés derrière l’unité sans faille de l’intersyndicale, ont exprimé clairement leur rejet de ce projet injuste, cruel et inutile : 70 % d’entre eux s’y opposent dont 90 % des salariés ! Le mépris que représente le fait d’ignorer un mouvement social massif et soutenu par nos concitoyens, alors même que l’exécutif ne disposait pas de majorité parlementaire pour adopter son texte, ne peut qu’être source de défiance durable.

Enfin, la promulgation du texte dans la nuit de vendredi à samedi est une provocation consciente supplémentaire d'un homme qui est toujours dans la posture de brutaliser nos concitoyens. Emmanuel Macron a visiblement décidé de mettre de l’huile sur le feu. Il n’y en avait pas besoin : c’est un pays et un peuple profondément en colère qui vont désormais s’exprimer face aux apprentis sorciers.

Notre démocratie républicaine pourrait connaître un moyen terme un grave accident électoral dont les apprentis sorciers qui nous gouvernent seront les seuls responsables.

Malheureusement, le Conseil Constitutionnel a également invalidé la première demande qui lui a été transmise de Référendum d’Initiative Partagée (RIP) sur le report de l’âge légal de la Retraite à 64 ans : des incertitudes juridiques planaient effectivement sur la rédaction de cette première demande. Nous espérons vivement que la seconde demande de RIP sera, elle, validée.
Car c’est la dernière occasion pour maintenir la confiance entre nos Concitoyens et la sincérité démocratique de nos institutions. Si cette seconde demande est validée, nous sommes confiants dans la possibilité de recueillir et même de dépasser les 4,7 millions de signatures d’électrices et d’électeurs pour demander au Parlement et à l’exécutif de convoquer le référendum.

Sans attendre la future décision du Conseil Constitutionnel, avec mon parti, la Gauche Républicaine & Socialiste, j'appelle donc à nouveau à la création de Comités locaux (départementaux) citoyens pour RIP sur les retraites, associant syndicats, partis politiques, associations et collectifs citoyens. Avec des parlementaires et des citoyens mobilisés, nous pouvons redonner la parole au peuple pour le faire décider et gagner.
Je réaffirme enfin notre confiance dans l’intersyndicale pour trouver les moyens adaptés à prolonger la mobilisation sociale.
TOUS ENSEMBLE NOUS POUVONS ENCORE EMPÊCHER LE REPORT DE L’ÂGE DE LA RETRAITE À 64 ANS.

Frédéric FARAVEL
Conseiller municipal et communautaire GRS de Bezons
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"
Animateur national du pôle Idées, formation, riposte de la Gauche Républicaine et Socialiste

Retraites : le combat continue ! Nous devons tout faire pour que l'exécutif plie !
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29 mars 2023 3 29 /03 /mars /2023 11:03

J'ai rédigé pour la Gauche Républicaine et Socialiste cette analyse (ci-dessous) des raisons pour lesquelles le Conseil Constitutionnel, s'il veut être cohérent avec sa propre jurisprudence, doit aboutir à une censure totale du projet de réforme des retraites porté par Emmanuel Macron et son gouvernement.

À mon sens, seule la saisine déposée par les sénateurs de gauche a une chance d’être entendue car elle ne met pas en cause le fond du texte qui est de l’ordre d’un débat politique (la saisine de la NUPES et du RN se trompent d’objet), mais s’attache à démontrer en quoi les conditions d’examen et les choix du Gouvernement pour empêcher les parlementaires de faire leur travail mettent en cause notre démocratie parlementaire déjà affaiblie et violent la constitution. ​​​​​​

Frédéric FARAVEL
Conseiller municipal et communautaire de Bezons
Animateur national du pôle Idées, formation et riposte de la Gauche Républicaine et Socialiste (membre du collectif de direction de la GRS)
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DOIT CENSURER TOUTE LA RÉFORME DES RETRAITES

Le projet de réforme des retraites d’Emmanuel Macron n’est pas seulement injuste et cruel socialement, inutile financièrement… Il est très probablement anticonstitutionnel ; Le Canard Enchaîné s’était d’ailleurs fait l’écho le 19 janvier dernier du fait que Laurent Fabius, président du Conseil Constitutionnel, avait prévenu le gouvernement que le texte pourrait bien être annulé pour vice de forme – une telle alerte en amont est assez rare. Les sénateurs des trois groupes de gauche de la Haute Assemblée, les députés des groupes de la NUPES, les députés et enfin la Première ministre elle-même ont déposé plusieurs recours1 devant le Conseil Constitutionnel contre le Projet de Loi de Financement Rectificative de la Sécurité Sociale (PLFRSS) pour 2023 qui est censé avoir été adopté suite à l’échec des deux motions de censure qui ont suivi le recours à l’article 49.3 par l’exécutif.

1 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decisions/affaires-instances?id=32246

Certes, des esprits avertis expliqueront que les Sages de la Rue de Montpensier jugent souvent avec des considérations politiques plutôt que de s’en tenir uniquement au seul respect de la Constitution. Mais lorsque l’on analyse les décisions du Conseil constitutionnel à travers les années, il ressort qu’il existe des contextes à censure plus ou moins forts. Quand l’Élysée, l’Assemblée, le Sénat et l’opinion publique convergent, il devient très délicat pour les Sages de censurer. Quand, au contraire, il y a division entre les institutions et avec l’opinion, les chances de censure augmentent. Et c’est peu de dire que la mobilisation populaire contre cette réforme a été massive et l’existence d’une majorité parlementaire pour la soutenir est sujette à caution.

Or en miroir, les motifs d’inconstitutionnalité pour des raisons de forme sont particulièrement sérieux. Il paraît donc difficile que le Conseil Constitutionnel ne censure pas la loi, quand bien même Emmanuel Macron pourrait considérer qu’il s’agit d’une espèce de déclaration de guerre envoyée à l’exécutif. On l’a vu cependant ranger dans les tiroirs sa menace de dissolution, tant la situation politique lui paraît défavorable, il n’est pas dit que sa marotte de remettre sur le métier une réforme des institutions – au passage de laquelle il sanctionnerait les Sages – puisse tenir très longtemps. A contrario, la validation de la loi par le Conseil Constitutionnel pourrait aggraver la crise politique – ou même de régime – dans laquelle le « cheminement » du PLFRSS a plongé le pays, car cela serait apporter une onction constitutionnelle à des dérives de l’examen parlementaire rarement atteintes.

Passons donc en revue des arguments en faveur de la censure.

Le recours de l’article 47-1 de la constitution

L’article 47-1 de la constitution permet au gouvernement de faire adopter un Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) en un temps restreint. En effet, celui-ci dispose que, « si l’Assemblée nationale ne s’est pas prononcée en première lecture dans le délai de vingt jours après le dépôt d’un projet, le gouvernement saisit le Sénat qui doit statuer dans un délai de quinze jours ».

Les délais qui enserrent un PLFSS ont un objectif : permettre l’adoption d’un budget avant la fin de l’année civile. En effet, si aucun n’est adopté avant le 1er janvier, nous pourrions nous retrouver en situation de shutdown (fermeture) à l’américaine. Le constituant en écrivant l’article 47 a donc prévu des délais et, en cas d’échec, une application temporaire par ordonnance ; lorsque les PLFSS ont été créés par la loi organique de 1996, une réforme constitutionnelle a amendé le texte pour copier pour ce nouveau véhicule législative, les dispositions prévues pour un projet de loi de finances (à la différence qu’un PLF bénéficie de 70 jours d’examen et non de 50). Or, ici, pas de limite du 1er janvier, pas d’urgence, sauf à considérer que si la réforme n’avait pas été votée en mars, le régime des retraites serait en faillite… ce que personne n’a dit (même si certains membres du gouvernement ou de la minorité présidentielle ont parfois tenté cette exagération rhétorique).

Première remarque : si dans une décision de 1983, le Conseil Constitutionnel a reconnu que le recours à l’article 47 était autant valable pour les projets de loi de finances rectificative (PLFR) que pour un PLF initial, aucune formulation de ce type n’a jamais été édictée pour un PLFRSS.

Deuxième remarque : la vocation d’un PLFR est de voter des crédits de façon limitative ; l’objectif d’un PLFRSS serait d’adapter en profondeur le texte initial pour assurer l’équilibre financier de la sécurité sociale. Ces adaptations sont en général réalisées lors du PLFSS suivant et il est important de rappeler qu’en deux années de crise sanitaire, aucun PLFRSS n’a été mise en discussion, alors que les équilibres ont été sérieusement bousculés et qu’il y a eu a contrario de nombreux PLFR.

Or il existe une jurisprudence du Conseil Constitutionnel qui pourrait s’appliquer à la situation présente et qui date de 1985 (bien que les PLFSS n’existassent point à l’époque) : dans sa décision n°85-190 DC du 24 juillet 19851, sur la loi de règlement du budget de 1983 (texte financier), le juge a considéré que « les mesures d’ordre financier commandées par la continuité de la vie nationale […] ne se retrouvent pas pour les lois de règlement » ; le recours à l’article 47 était donc invalide, l’ensemble de la loi fut censurée.

L’analogie est ici très forte avec le PLFRSS mis en cause : une réforme des retraites envisagée depuis 2017 par Emmanuel Macron (quelle que soit la forme qu’elle prend) n’a pas besoin d’un examen en urgence, elle ne causera pas plus de difficultés de fonctionnement à la Sécurité Sociale que son examen ait pris 50 jours ou plusieurs mois, pas plus que les délais pour l’examen d’une loi de règlement n’empêcheraient un exécutif de faire exécuter le budget du pays. Les contraintes en matière de délai d’examen du PLFRSS sont d’autant moins fondées que les mesures qu’il contient n’ont pas vocation à être appliquées au lendemain de la promulgation de la loi, mais au plus tôt au 1er septembre 2023, et encore uniquement pour une partie infime d’entre elles, n’ayant donc aucun impact sérieux sur l’équilibre financier de la sécurité sociale en 2023 (voire même pour les années suivantes).

Ainsi, plus largement, c’est le recours au PLFRSS pour porter une réforme des retraites qui pose problème.

Peut-on réformer notre système des retraites au détour d’un PLFSS ou d’un PLFRSS ?

Nous l’avons indiqué plus haut, selon l’alinéa 19 de l’article 34 de la constitution, un PLFSS (et a fortiori un PLFRSS) « déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ».

Il s’agissait ici de permettre au Parlement de mieux exercer ses missions de législation et de contrôle, quand l’emploi de cette méthode législative pour réformer les retraites en 2023 ne vise qu’à accélérer la procédure parlementaire ce qui limitent les capacités des parlementaires à exercer leur mission.

Les décisions du Conseil Constitutionnel de 2008, 2019 et 2022 ont précisé, après la réforme constitutionnelle de 1996, que les dispositions d’une loi de financement de la sécurité sociale devaient avoir un effet ou ne pas être dépourvues d’effet indirect sur les recettes et les dépenses. C’est sur cette qu’une censure partielle avait été appliquée au PLFSS pour 2020, concernant l’application du « bonus malus » pour les cotisations d’assurance-chômage2, le juge considérant que les effets sur les recettes de la sécurité étaient trop indirects et que son impact financier était évalué comme nul pour 2021, 2022 et 2023.

Nous l’avons dit plus haut si le recours à des PLFR est fréquent, celui à des PLFRSS est rare car inadapté en réalité à la situation de la sécurité sociale et à l’exercice des droits des assurés. Un PLFRSS ne doit agir que sur les recettes et les dépenses de l’année concernée, or les conditions d’usage des droits sociaux ne peuvent pas être gérées à court terme. C’est pourquoi les adaptations sont généralement réalisées l’année suivante et non en cours d’exercice.

On est donc face à un détournement complet du texte constitutionnel par le gouvernement à la seule fin d’empêcher un examen serein d’une réforme des retraites qui aurait des effets non immédiats et à moyen et long terme ; les effets sur l’année 2023 de ce PLFRSS sont quasiment inexistant et plus de la moitié des articles du texte soumis au débat parlementaire n’apportaient aucune modification au budget des différentes branches de la sécurité sociale.

Le choix d’un PLFRSS ne vise donc qu’à des objectifs dilatoires : justifier de recourir à l’article 47.1 de la constitution pour limiter le temps des débats ; permettre au gouvernement de trouver un accord en Commission Mixte Paritaire (CMP) pour contourner son absence de majorité à l’Assemblée nationale ; en l’absence de CMP, justifier de légiférer par ordonnance (sachant que le Conseil Constitutionnel a pris en décembre 2020 une décision dangereuse qui rend inutile le vote d’une loi de ratification pour rendre définitives les dispositions contenues dans une ordonnance).

Une validation du PLFRSS « portant réforme des retraites » par le Conseil Constitutionnel serait donc à l’origine d’une nouvelle jurisprudence, permettant à l’avenir de réformer à nouveau les retraites de la sorte, voire d’étendre l’usage du PLFRSS à d’autres réformes sociales d’ampleur en contraignant le parlement sans que la contrainte ne se justifie.

Le principe de clarté et de sincérité des débats parlementaire a-t-il été respecté ?

Le Conseil Constitutionnel a établi en 2009 qu’au regard de l’article 6 de la Déclarations des Droits de l’Homme et du Citoyen les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire ont une valeur constitutionnelle3. Exigences qui conduisent régulièrement le Conseil à émettre des réserves plus ou moins fortes sur la constitutionnalité des textes soumis à son examen.

Or si le gouvernement puis la majorité sénatoriale ont eu recours à des procédures parfaitement constitutionnelles ou réglementaires, qui prises séparément n’entraîneraient peut-être pas la censure du texte, leur accumulation aboutit à une mise en cause de la clarté des débats, ceux-ci ne pouvant se tenir dans des conditions de sérénité suffisante, les règles du débat parlementaire étant modifiées à plusieurs reprises en cours d’examen.

Ainsi outre le recours à l’article 47.1 de la constitution, dont nous avons détaillé plus haut les effets, le gouvernement a eu recours à l’article 44.2 de la constitution – pour refuser l’examen d’amendements en séance qui n’avaient pu être examinés en commission des affaires sociales et pour lesquels la présidente de la commission refusait une nouvelle réunion – puis l’article 44.3 pour obliger le Sénat à se prononcer par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le Gouvernement (procédure dite du « vote bloqué »), avant d’avoir recours au fameux 49.3.

La majorité sénatoriale a de son côté eu recours à de nombreuses procédures réglementaires visant à empêcher l’opposition de défendre ses amendements. L’article 38 du règlement du Sénat pour clore les débats sur les explications de vote relatives à des amendements a été invoqué 6 fois. Le bureau du Sénat a également eu recours à l’article 42 du règlement du Sénat pour limiter à un orateur par groupe les prises de parole sur article et les explications de vote ; il a déclaré irrecevables des centaines d’amendements et de sous amendements sur la base d’interprétations abusives en invoquant l’article 44 bis du règlement du Sénat : la présidente de la commission a notamment prétexté que les centaines de sous amendements présentés à l’article 7 n’avaient pas de lien avec le texte, après une réunion expresse de la commission pendant une interruption de séance de 50 mn pendant laquelle il était matériellement impossible de tous les examiner.

Surtout, il a été fait usage à quatre reprises de l’article 44.6 du règlement du Sénat pour permettre l’examen en priorité d’amendements de la majorité sénatoriale, rédigés à la seule fin de réécrire certains articles afin de faire tomber plus d’un millier d’amendement issus des rangs de l’opposition : ainsi les amendements de la majorité sénatoriale ont pu être débattus sans que les amendements de l’opposition puissent l’être.

L’usage fait ici des article 44.6 et 44 bis du règlement constituent donc une violation manifeste du droit d’amendement des parlementaires, pourtant garanti par l’article 44.1 de la constitution. Tout ceci accumulé dans un contexte où le temps du parlement était déjà contraint, alors que l’opposition sénatoriale n’a pas tenté d’empêcher l’adoption du texte, marque une défaillance majeure de la clarté et de la sincérité des débats. Pour compléter, en août 2021, le Conseil Constitutionnel avait considéré que si seulement 5 amendements parmi les centaines considérés irrecevables lors d’un examen en commission cela ne portait pas atteinte à la clarté et à la sincérité des débats : là on parle de plusieurs milliers déclarés irrecevables dans des conditions pour le moins rocambolesques.

Bien que cela ne soit évoqué que dans la saisine du groupe du Rassemblement National, en matière de clarté et de sincérité des débats, on peut aussi rappeler que sur la question des 1 200 euros, la « vérité » et les informations données par le gouvernement ont énormément évolué au fil du débat parlementaire, en l’absence de véritable étude d’impact – Olivier Dussopt refusant au demeurant de transmettre à plusieurs reprises la note du Conseil d’État et d’autres documents pourtant de nature publique : on peut donc là-aussi considérer que les exigences de valeur constitutionnelle n’ont pas été respectées, le gouvernement donnant aux parlementaires des informations contredites ensuite par sa propre expression et lui en dissimulant d’autres.

Il est d’autre part assez déroutant de constater les conséquences baroques du 47.1 en matière de procédure parlementaire. Après le vote en première lecture par le Sénat, la CMP a été réunie. Une CMP vise à trouver un compromis entre les deux chambres lorsque celles-ci ont adopté des versions différentes du même texte ; or l’Assemblée nationale n’ayant pas adopté de texte à l’issue des 20 jours qui lui étaient impartis, il n’y avait sur la table qu’un seul texte issu d’une des deux assemblées !? Sur quelle base s’est donc déroulée la négociation pour trouver un texte de compromis en CMP ? Sur la confrontation du texte que le gouvernement avait transmis au Sénat, sans qu’il soit voté par l’Assemblée nationale, et du texte adopté par le Sénat : la CMP a donc discuté du texte du gouvernement et du texte du Sénat, elle a été un lieu d’une négociation entre le gouvernement et les sénateurs, alors qu’elle doit être le lieu d’une négociation entre les députés et les sénateurs.

Cela ne s’arrête pas là : au sortir de la CMP, le texte de compromis a été soumis au Sénat jeudi 16 mars au matin ; le texte n’a été rendu public que 35 mn avant le début de la séance. D’aucuns pourraient considérer que le texte de la CMP était connu – au moins dans les grandes lignes – depuis la fin de l’après-midi du jour précédent… pas de quoi chipoter… Sauf que entre le texte issu de la CMP la veille et celui qui sort du Sénat le 16 mars à 10h42, le gouvernement y a fait ajouter un substantiel amendement financier. Le texte qui est donc arrivé devant l’Assemblée nationale à 15h le même jour n’était plus celui de la CMP et c’est sur ce texte qui n’était plus celui de la CMP que le gouvernement a eu recours au 49.3. Jusqu’au bout, l’examen du projet de réforme des retraites aura été l’objet de chausse-trappes de la part de l’exécutif et de la majorité sénatoriale qui mette en cause la transparence, la clarté et la sincérité du débat parlementaire.

Les « cavaliers sociaux » de la réforme des retraites

Un “cavalier social” est une disposition dont la présence dans une loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) est proscrite par l’article 34 alinéa 20 de la Constitution et l’article 1er de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale, car ne relevant ni du domaine exclusif des LFSS ni de leurs domaines facultatifs. À défaut, les “cavaliers sociaux” inclus dans un projet de loi de finances font systématiquement l’objet d’une censure par le Conseil constitutionnel4.

En choisissant donc le véhicule législatif du PLFSS afin de prétendre recourir à l’article 47.1 de la constitution, l’exécutif s’est en réalité pris lui-même les pieds dans le tapis. En effet, plusieurs dispositions de son projet de réforme qui auraient pu être jugées conformes à la constitution dans un projet de loi ad hoc risquent d’être censurées car elles n’ont pas leur place dans un PLFSS.

C’est le cas de l’index senior (article 2 du PLFRSS) qui n’a en réalité aucun effet sur les recettes et les dépenses de la sécurité sociale, se contentant d’une obligation de publication d’indicateurs. Le « CDI senior » introduit par la droite sénatoriale (nouvel article 3) souffre de la même faiblesse.

Enfin, plusieurs alinéa d’articles (10 et 17) du PLFRSS n’affecteront pas les dépenses et les recettes de la sécurité sociale en 2023… or justement, c’est l’objet d’un tel véhicule législatif.

Conclusion

On le voit les raisons de censurer le projet de réforme des retraites ne manquent pas ; le gouvernement a accumulé les fautes stratégiques graves, pensant qu’il se donnait les moyens d’imposer son texte qu’il dispose ou non d’une majorité parlementaire. Son allié politique – la majorité sénatoriale LR – en a ajouté plusieurs couches.

Une saisine du conseil constitutionnel n’interroge évidemment pas ici le sujet de fond ; nous nous sommes opposés à la réforme des retraites exigées par Emmanuel Macron parce qu’elle était injuste, cruelle et inutile, vous retrouverez ici nos arguments à ce propos5. De ce qui aurait dû être un débat politique et social majeur, toujours susceptible de créer des oppositions farouches et un fort mouvement social, nous sommes passés au bord de la crise de régime car, au-delà du caractère injuste du projet, les méthodes auxquelles l’exécutif a choisi d’avoir recours mettent en réalité gravement en cause la démocratie parlementaire.

Le « parlementarisme rationalisé » de la Vème République est ainsi fait : ce n’est pas la première fois qu’un gouvernement use de procédures pour établir un rapport de force avec les parlementaires, surtout quand il ne dispose pas de majorité absolue. Ce n’est pas la première fois qu’un gouvernement fait adopter un projet de loi avec le 49.3 – qu’il y ait ou non un mouvement social. Ce n’est pas la première fois que le 47.1 est utilisé (il l’est tous les ans pour l’examen du PLFSS)… on pourrait faire l’énumération ainsi sur plusieurs lignes encore. Par contre, c’est la première fois qu’on tente de transformer profondément un des piliers de notre modèle social au détour d’un aménagement de texte budgétaire, là où un débat de société et un débat parlementaire éclairé et patient devrait être nécessaire. Et c’est également la première fois qu’à peu près toutes les procédures de contraintes contre le parlement ont été utilisées pour le même texte – « sauf peut-être l’article 16 » s’est permis d’ironiser le sémiologue Clément Viktorovitch devant Aurore Bergé, le 20 mars dernier sur TF1.

Ce qui est en cause aujourd’hui n’est donc plus seulement la dégradation brutale d’une partie de notre modèle social, mais le fait que les conditions d’examen de cette réforme créent un précédent grave mettant à mal notre conception de la démocratie et de la souveraineté populaire. Si le Conseil Constitutionnel validait (même partiellement) ce texte là, car la majorité de ses membres serait acquise au fond de la réforme, il porterait la grave responsabilité de donner à l’avenir à l’exécutif un blanc seing pour passer n’importe quel texte de loi sans réel débat parlementaire.

Cette pente est dangereuse ; il doit donc absolument déclarer inconstitutionnel l’ensemble du texte.

1 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/1985/85190DC.htm

2 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2019/2019795DC.htm

3 https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2009/2009582DC.htm

4 Par exemple : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2022/2022845DC.htm

5 https://g-r-s.fr/campagne-retraites/

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22 mars 2023 3 22 /03 /mars /2023 08:00

Après des semaines de mépris pour les Français qui ont manifesté dans le calme et souvent dans la joie, après des semaines d’empêchement parlementaire, l’exécutif est arrivé au bout du processus qu’il avait échafaudé pour imposer sa réforme des retraites injuste et inutile.

Ce n’est pas vrai que la loi toucherait tous les salariés de la même façon : ce projet ne change rien pour des gens comme moi… Nous, on a déjà été frappé par la loi Touraine votée en 2014 par les groupies PS de François Hollande… Non, les effets de ce texte s’il était mis en œuvre seraient essentiellement supportés par les plus modestes, ceux qui auront à travailler plus sans voir leurs pensions progresser, ceux qui ont commencé à travailler tôt et qui exercent des emplois pénibles, précaires, celles et ceux qui ont des carrières hachées, principalement les femmes. Ce sont eux qui vont trinquer pour les marchés financiers et les actionnaires. C’est inacceptable !

Le recours à l’article 49.3 (après le 47.1 et le 44.3) en fin de parcours et le nombre de voix recueillies par la motion de censure transpartisane à l’Assemblée Nationale démontrent s’il en était besoin qu’Emmanuel Macron et Élisabeth Borne n’ont pas plus de majorité politique au parlement qu’ils n’en ont dans le pays.

Depuis des semaines, sous la conduite d’une intersyndicale unie et efficace, nos concitoyens se sont mobilisés avec détermination pour exprimer leur refus de la retraite à 64 ans, pour exprimer l’exigence de 90 % des salariés que ce projet illégitime soit retiré.

Depuis hier soir, la demande des parlementaires de gauche un référendum d’initiative partagée est sur le bureau du Conseil Constitutionnel : face à la crise politique créée par Emmanuel Macron, il faut donner le dernier mot aux Français. Ils doivent pour trancher souverainement sur la question.

Une nouvelle étape du combat commence : continuons les manifestations et les rassemblement, mais dès aujourd’hui organisons-nous collectivement pour accompagner nos concitoyens et pour collecter les 4,7 millions de signatures nécessaires pour ce référendum.

La Gauche Républicaine et Socialiste appelle l’ensemble des partenaires – partis, syndicats et associations – qui sont favorables à ce référendum à constituer dans les plus brefs délais un comité départemental citoyen et populaire pour le référendum.

NOUS DEVONS GAGNER CONTRE LE GOUVERNEMENT !

NOUS POUVONS GAGNER – NOUS ALLONS GAGNER !

Frédéric FARAVEL
Conseiller municipal et communautaire Gauche Républicaine et Socialiste de Bezons
Animateur national du pôle Idées, Formation, Riposte de la Gauche Républicaine et Socialiste
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes et républicains

À Bezons comme ailleurs, poursuivons la mobilisation contre la réforme des retraites : exigeons sont retrait, utilisons la mobilisation pour un référendum pour amplifier !À Bezons comme ailleurs, poursuivons la mobilisation contre la réforme des retraites : exigeons sont retrait, utilisons la mobilisation pour un référendum pour amplifier !À Bezons comme ailleurs, poursuivons la mobilisation contre la réforme des retraites : exigeons sont retrait, utilisons la mobilisation pour un référendum pour amplifier !
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10 octobre 2022 1 10 /10 /octobre /2022 18:12

J'ai rédigé avec Gurvan Judas le communiqué ci-dessous pour la Gauche Républicaine et Socialiste concernant le mouvement social des salariés des raffinerie de TotalEnergies et ExxonMobil. Il est clair qu'il faut les soutenir dans un combat qui permettra non seulement une victoire sur les salaires mais une victoire contre les profits indus des sociétés pétrolières.

Frédéric Faravel
Conseiller municipal et communautaire de Bezons
Membre de la direction nationale de la Gauche Républicaine et Socialiste
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"

Pour les salariés et les Français, il faut faire plier les sociétés pétrolières

Depuis plusieurs semaines en France, une situation de pénurie de carburants monte inexorablement sur tout le territoire national mais en touchant plus particulièrement les Hauts-de-France ou l’Île-de-France. La communication gouvernementale a cherché, ces derniers jours, à masquer cette situation en noyant la réalité du terrain sous des moyennes qui n’ont pas de sens.

Cette situation est consécutive au refus du gouvernement de regarder la réalité en face : durant tout le mois de septembre, Bruno Le Maire et Roland Lescure – suivis par tout l’exécutif – ont raconté à qui voulait l’entendre que les super-profits n’existaient pas, qu’il n’y avait donc rien à taxer, tout en reconnaissant que la manne financière des sociétés pétrolières devaient servir à compléter les « ristournes » gouvernementales à la pompe et augmenter les salaires s’il le souhaitait. Un nouvel exemple de l’exercice habituel : « Bruno demande » a toujours été le maître mot de Bercy à l’égard des grandes entreprises, sans que l’on ne lise jamais « Bruno agit » ou « Bruno décide ».

Résultats :

  • Total a décidé de casser les prix provoquant une distorsion de la concurrence qui a rapidement mis à sec ses propres stations face à l’afflux de clients ;
  • les salariés d’ExxonMobil (Esso) et de TotalEnergies se sont mis en grève face à la sourde oreille de leurs dirigeants…

La pénurie dans les stations services s’est donc largement diffusée, touchant d’abord le diesel mais s’étendant rapidement à d’autres types de carburants. Les filles d’attentes sont interminables devant certaines stations, alors que dimanche 9 octobre les mouvements de grève ont été reconduits dans les raffineries chez TotalEnergies et ExxonMobil.

La grève des raffineurs est totalement légitime !

L’exigence d’augmentation de salaires des raffineurs d’ExxonMobil et TotalEnergies est parfaitement justifiée par les bénéfices de ces deux grands groupes, grâce notamment à la hausse des prix des hydrocarbures. TotalEnergies avait engrangé 14 milliards d’euros en 2021, et « a déjà cumulé plus de 18 milliards d’euros sur les six premiers mois de cette année ». Le PDG de Total s’est augmenté de 50% l’année dernière. La société TotalEnergies a annoncé le 28 septembre 2022 qu’elle verserait un acompte sur dividende exceptionnel de 1 € par action en décembre 2022, au-delà de l’augmentation de 5% des acomptes trimestriels déjà annoncée en avril et mise en œuvre. Sur cette base, le montant final du dividende 2022 de l’action TotalEnergies serait de 3,76 €/action. L’« acompte » ainsi annoncé s’élève à 2,6 milliards d’euros !

Il était légitime que les salariés, dont les conditions de travail sont particulièrement difficiles, aient aussi le droit à une augmentation comme tous les actionnaires.

La CGT revendique notamment que les salaires des employés soient revalorisés « à hauteur de 10% pour l’année 2022, soit 7% pour l’inflation et 3% « pour le partage de la richesse » ; elle réclame également une remise en état des raffineries.

La Gauche républicaine et Socialiste soutient ce mouvement de grève et souscrit aux revendications des syndicats demandant une augmentation des salaires et une remise en état des raffineries.

Cette situation ne peut plus durer ! Les bénéfices des actionnaires doivent bénéficier aux employés et à la collectivité. La lutte commence à payer puisque la direction de TotalEnergies qui refusait jusqu’ici toute discussion s’est dit prête à ouvrir des négociations sur les salaires, à la condition que la grève s’arrête : c’est un encouragement à maintenir la pression. Une pression qui doit également s’amplifier concernant la taxation des super-profits.

Les Français pour qui la voiture est indispensable au quotidien souffrent de cette pénurie qui les pénalise injustement : il s’agit de la majorité de la population qu’elle vive en milieu rural, dans la « France périphérique », dans le périurbain ou même en banlieue des métropoles.

Nous exigeons de la part du gouvernement des mesures concrètes pour sortir de cette crise en répondant aux demandes des salariés et des usagers.

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5 octobre 2022 3 05 /10 /octobre /2022 13:14

J'ai rédigé le 17 septembre dernier cette tribune parue ce 5 octobre 2022 dans L'Observateur. Le travail peut permettre de s’émanciper et d’être utile au collectif. La gauche doit défendre non pas la « valeur travail », mais la valeur du travail. Avec pour objectif de lui redonner son sens, estiment avec moi Nathalie Moine et Anthony Gratacos, élus locaux et membres de la direction nationale de Gauche Républicaine et Socialiste.

Le travail n’est pas « de droite », il est humain !

En cette rentrée de septembre, toute la gauche s’ébroue et se dispute sur un sujet majeur : celui du travail, de sa valeur, de sa place dans la société et dans la gauche. On doit à François Ruffin et à Fabien Roussel, chacun à leur manière, de débattre enfin d’une question trop souvent éludée : et c’est tant mieux. Bien sûr, certains ont choisi la polémique et les règlements de comptes qui n’ont plus rien à voir avec le sujet. Mais émerge peu à peu entre la gauche issue du mouvement ouvrier et le versant « écologiste » de la gauche une véritable dispute, riche de sens, au bout de laquelle il faut aller pour clarifier notre projet à l’attention des Français et des classes populaires.

La « valeur travail […] est quand même une valeur de droite » disait Sandrine Rousseau le 15 septembre. « On n’a pas besoin de la force de travail de tout le monde » affirmait sur Public Sénat David Cormand, eurodéputé EELV trois jours plus tôt…

Ces deux déclarations, cohérentes l’une avec l’autre, montrent la conception profondément différente du travail portée par les écologistes. Et si Sandrine Rousseau fait référence à Karl Marx pour dénoncer les propos de Fabien Roussel, elle oublie que l’aliénation du travail dénoncée par le théoricien de la valeur-travail mettait en cause la spoliation des travailleurs par le capital du produit de leurs efforts, les réduisant ainsi ne plus posséder que leur force de travail, qu’ils vendaient contre un subside de misère. L’idée du XIXe siècle, chez tous les philosophes et acteurs d’un mouvement socialiste en construction, c’est que l’émancipation des travailleurs doit passer par leur association, leur rendant ainsi la maîtrise de l’outil de travail et le bénéfice de son produit. « Ouvriers, paysans, nous sommes, le grand parti des travailleurs… » rappelle « l’Internationale », ce grand hymne de la droite ! Il n’a jamais été question pour la gauche de supprimer le travail, mais construire la dignité retrouvée des travailleurs.

 

Il faut aussi répondre à notre ami David Cormand… Quelle situation autorise donc à ce que nous n’ayons « pas besoin de la force de travail de tout le monde » ? Celle où des entreprises multinationales, souvent de connivences avec des Etats peu démocratiques, exploitent la force du travail de centaines de millions de nouveaux esclaves en Asie, en Afrique ou en Amérique latine, pour produire ce qui permet à relativement bas coût notre mode de vie européen. Il nous rétorquera que c’est ce mode de vie qu’il faut changer – et il n’aura pas entièrement tort –, si ce n’est que seule une partie privilégiée en profite dans nos sociétés. De même, on pourra dire avec lui que nous n’avons pas besoin de la force de travail de tout le monde ou d’abrutir au travail tout le monde : c’est le sens de notre combat pour un système de retraite juste, qui récuse une dégradation de l’âge de départ, ou pour la réduction du temps de travail, qui est une constante de l’histoire sociale.

Mais quand on mesure le nombre de besoins sociaux et de besoins économiques (ceux nécessaires à garantir notre souveraineté, notre autonomie) insatisfaits, ce plaidoyer pour la « fin du travail » est mortifère, sans même parler de tous ceux parmi nos concitoyens qui recherchent un travail décent en vain et que cette posture condamne dans le fond à vivre d’expédients ou de la solidarité nationale.

Redonner du sens au travail, une aspiration révolutionnaire !

Après les Etats-Unis, la France et certains pays européens sont eux-mêmes atteints d’une vague importante de démissions qui pose la question du sens donné au travail par les travailleurs eux-mêmes. Il est urgent de travailler sur la soutenabilité du travail, les conditions de travail, la qualité du travail, dans le secteur privé mais aussi le secteur public (songeons aux démissions massives dans le domaine de la santé ou de l’éducation) et aussi dans le contexte de la crise écologique (notre travail aggrave-t-il la situation ?).

Le travail est-il seulement un effort fastidieux réalisé en contrepartie de rémunérations, sans valeur en lui-même ? A l’opposé, le travail ne serait-il donc qu’une pure expérience d’aliénation dont il faudrait se départir ? Nous réfutons ces visions, l’une comme l’autre : notre conception politique est celle du travail comme activité de transformation du monde, de la nature, de la société et de l’individu lui-même. Toutes les recherches, sur cette question trop souvent éludée par les responsables politiques, ont démontré que le travail est une activité centrale dans la vie des gens, quoi qu’on en dise : personne ne peut nier son importance dans la vie sociale, dans la construction de notre utilité (ou même notre identité) sociale. Par contre on peut contester la façon dont il est organisé aujourd’hui. Le poids croissant des marchés financiers internationaux sur le fonctionnement des entreprises induit ainsi une exigence de contrôle et de reporting à tous les niveaux de la chaîne de travail, qui vise à les (r) assurer sur la rentabilité de leurs placements mais dépossèdent à nouveau les travailleurs. De l’atelier et du bureau jusqu’à la finance libéralisée, il y a bien une révolution démocratique à engager !

Une étude récente de la Dares évalue à 3 % le nombre de démissions aujourd’hui, bien plus élevé que d’habitude (mais moins qu’aux Etats-Unis où l’on parle de Big Quit), elle montre également que ce sont les conditions de travail qui les motivent aujourd’hui bien plus qu’il y a vingt ans : les fameux métiers en tension pour lesquels on n’arrive pas à embaucher sont aussi ceux qui ont les plus mauvaises conditions de travail. Les travailleurs qui décident de changer d’emploi – et cela aussi a été renseigné par une autre étude de la Dares avant la crise sanitaire – le font en général pour trouver un emploi mieux payé avec des conditions de travail plus saines.

Cette démarche reste cependant celle d’une part infime des salariés français… L’immense majorité de nos concitoyens n’ont pas le luxe aujourd’hui (au sens propre du terme, car ils n’ont pas les économies nécessaires pour se permettre une transition) de ce pari : c’est donc là tout l’enjeu qui est devant nous. Il ne s’agit pas seulement de parler de « valeur travail » en suggérant une posture moralisatrice, mais de combattre pour faire reconnaître la valeur DU travail – donc augmenter les salaires –, pour améliorer les conditions de travail – donc renforcer le droit du travail et les moyens pour le faire appliquer (on manque tant d’inspecteurs et de médecins du travail !) –, et pour redonner du sens au travail – construire une société du plein-emploi, où les salariés soient écoutés et participent aux décisions de leur entreprise, qui ne détruise pas notre environnement, pour que chacun puisse trouver le travail qui lui permettra de se réaliser et d’être utile au collectif.

Il s’agit aussi de rappeler que notre Etat social repose essentiellement sur les revenus du travail. Sans travail pas de protection sociale. L’une des applications concrètes de notre Etat social fut d’attacher au statut de salarié un cadre légal visant à sortir de l’arbitraire capitaliste. D’ailleurs, la stratégie des nouveaux acteurs du capitalisme, que sont notamment les plateformes numériques, vise à enfoncer un coin dans le statut protecteur du salariat, faisant passer l’auto-entreprenariat ou la soumission à un algorithme pour une forme de libération alors que cela replonge le travailleur dans la même logique d’aliénation qui est dénoncée.

Le débat engagé est donc celui d’un choix de société… Il est salutaire et commande notre capacité à comprendre nos concitoyens et à apporter à leurs aspirations des réponses concrètes. Il ne s’agit pas seulement de construire le plein-emploi de demain, car on peut l’imposer en renforçant l’exploitation : non ! Nous voulons une société de citoyennes et de citoyens émancipés, fiers de ce qu’ils apportent à la société, fiers du fruit de leur travail. Car le travail est humain !

Frédéric Faravel, conseiller municipal et communautaire de Bezons (95)
Nathalie Moine, conseillère municipale de Saint-Pathus (77)
Membres de la direction nationale de la Gauche républicaine et socialiste
Anthony Gratacos, secrétaire général de la Gauche républicaine et socialiste, conseiller départemental de Seine-et-Marne, chef d’entreprise

Le travail n’est pas « de droite », il est humain !
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5 octobre 2022 3 05 /10 /octobre /2022 09:20

Vendredi 30 septembre 2022, en conseil municipal, j'ai soulevé une situation véritablement lamentable en révélant les choix délirants du syndicat AZUR alors que se met en place progressivement le réseau de chaleur urbaine à Bezons. Ce réseau a été obtenu de haute lutte contre la mairie de droite d'Argenteuil en 2019 car il permettait de protéger les Bezonnais qui y seraient connectés des hausses excessives des factures de chauffage. Il est d'ailleurs étonnant que jamais à partir de juillet 2020, l'équipe divers droite de Mme Menhaouara n'ait voulu communiquer en direction des Bezonnais pour expliquer la raison des nombreux travaux qui les dérangeaient fortement : les habitants auraient sans doute aimé savoir qu'en étant chauffé par la chaleur produite par l'usine AZUR, ils allaient voir progressivement les coût de chauffage se réduire et ne plus dépendre des prix de l'énergie.

⚡️C'était un atout majeur : on le voit aujourd'hui quand les prix du gaz et de l'électricité explosent ! Or en 2021 puis 2022, AZUR a choisi de vendre une partie importante de sa chaleur pour produire de l'électricité et la vendre à haut prix. Cela n'a pas posé de problème en 2021, mais cette année, AZUR a trop vendu de chaleur et doit aujourd'hui compenser ce manque, alors que nous entrons dans l'hiver❄️, en achetant du gaz dont le prix est devenu exorbitant. AZUR a gâché un système prévu pour protéger les Bezonnais : c'est du sabotage !

Si l'on ne fait rien, cette augmentation va se retrouver sur la facture des Bezonnais. Or visiblement, la maire n'a pas l'intention de demander à AZUR de compenser les effets sur la facture et annonce en plus qu'il faudra baisser la température du chauffage dans les logements : c'est scandaleux !

Frédéric FARAVEL
Conseiller municipal et communautaire Gauche Républicaine et Socialiste de Bezons
Président de "Vivons Bezons, le groupe des élus communistes, socialistes & républicains"

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